COP26 : à Glasgow, le sommet de la dernière chance pour limiter l’ampleur du réchauffement

La COP26 s’ouvre dimanche à Glasgow dans une ambiance incertaine et sur fond de prévisions très alarmantes sur le réchauffement. Les engagements des grands pays émetteurs de gaz à effet de serre sont loin de suffire pour limiter la hausse de température à 1,5 degré.

Publié le 29 oct. 2021 à 6:54Mis à jour le 29 oct. 2021 à 14:27
Sur le site de la COP26, qui s'ouvre lundi à Glasgow, des graffitis alertent sur les effets du changement climatique. (Julien Marsault/Hans Lucas/Reuters)
Sur le site de la COP26, qui s’ouvre lundi à Glasgow, des graffitis alertent sur les effets du changement climatique. (Julien Marsault/Hans Lucas/Reuters)

C’est une bombe dont le tic-tac assourdissant résonne dans le monde entier et que les Etats, réunis à Glasgow à partir de lundi dans le cadre de la COP26, ont de maigres chances de désamorcer. Le franchissement du seuil de 1,5 degré de réchauffement, au-delà duquel la Terre va se muer en milieu hostile pour ceux qui l’habitent, est devenu depuis le dernier rapport publié cet été par le Giec une question de quelques années et non plus de décennies.

Sauf, hypothèse hautement improbable, si les négociateurs des 196 parties qui ont approuvé en 2015 l’accord de Paris sur le climat où cette ligne rouge a été fixée à la fin du siècle, ne parviennent à en décider autrement. Ils ont deux semaines pour faire mentir les scientifiques par la force et la crédibilité des engagements de leurs gouvernements.

« Je suis très inquiet […]. Il est possible que nous n’ayons pas les accords dont nous avons besoin », estimait lundi Boris Johnson, le Premier ministre britannique, habituellement d’un optimisme inoxydable. De fait, rarement l’avalanche de rapports qui précède chaque COP n’aura déversé d’aussi sombres prévisions.

Selon l’un des tout derniers en date, l’« Emissions Gap Report 2021 », mis en ligne mardi sur le site du Programme des Nations unies pour l’Environnement (PNUE), « l’objectif 1,5 » en 2100 ne peut désormais plus être atteint qu’au prix d’une division par deux en huit ans des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES). Or, c’est tout le contraire qui s’annonce avec un niveau de réchauffement attendu de 2,7 degrés d’ici la fin du siècle, soit presque deux fois plus qu’espéré.

Cette prévision s’appuie essentiellement sur les engagements volontaires – les NDC dans le jargon onusien – que chaque Etat doit prendre pour réduire ses émissions de GES ainsi que le stipule l’Accord de Paris. Des engagements qui leur sont imposés de mettre à jour tous les cinq ans. C’est donc à la veille de la COP26, reportée de 2020 à 2021, qu’a sonnée l’heure du premier bilan. Et c’est lors de celle-ci que les Etats devront s’entendre sur les efforts supplémentaires à mener pour retrouver la trajectoire « 1,5 ».

Des absences remarquées

Il y a du pain sur la planche. Au 25 octobre, 143 Etats sur les 191 tenus de se plier à cet exercice (soit 61 % des émissions de GES de la planète) ont pris des engagements nouveaux. La Chine, premier émetteur mondial (27 % du total) a officiellement transmis les siens jeudi aux Nations unies, à trois jours de la COP26. Ils reprennent les objectifs de sa feuille de route, à savoir atteindre son pic d’émissions « avant 2030 » et la neutralité carbone « avant 2060 ». Son président Xi Jinping n’ira pas à Glasgow, signe, peut-être, que Pékin ne compte guère aller beaucoup loin. La Russie, qui vise le même objectif de neutralité carbone, ne sera pas plus représentée par l’homme fort du Kremlin, Vladimir Poutine.

En revanche, après avoir laissé planer le suspense, Narendra Modi, le Premier ministre indien, viendra à la COP26, entretenant l’espoir d’un nouvel engagement ferme. A ce jour, l’Inde, deuxième plus gros pollueur de la planète, n’a pas publié de nouvelle NDC. Les autres pays les plus émetteurs, comme ceux du Golfe et l’Australie, se sont réengagés, mais de façon peu contraignante. Quant aux Etats-Unis, s’ils se sont remis dans le tempo, en affichant un objectif de réduction de 50 à 52 % de leurs GES d’ici 2030, il va leur falloir le rendre crédible.

Pour maintenir la trajectoire vers un réchauffement limité à 1,5 degré, « le monde aurait besoin de sept fois plus d’ambition », alerte Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies. Et il en faudrait, toujours selon lui, quatre fois plus pour être compatible avec + 2 degrés, l’objectif alternatif de l’Accord de Paris.

Ajoutez à cela que les engagements pris ne sont jamais à l’abri d’un retournement de conjoncture. La production mondiale de combustibles fossiles, alors qu’elle devrait commencer à baisser immédiatement, est repartie à la hausse, selon un autre rapport du PNUE . A ce jour, les prévisions des gouvernements pour 2030 sont plus de deux fois supérieures à une production compatible avec les accords de Paris.

Le retour du charbon

La Chine, qui prétend vouloir limiter à moins de 20 % l’usage de ces ressources énergétique d’ici 2060 s’est remise à importer de la houille d’Australie. Quant au nombre de centrales au charbon qu’elle a en chantier ou en projet, même réduit, celui-ci représente encore plus de la moitié (55 %) de toutes celles qui doivent encore sortir du sol dans le monde.

L’autre grand défi de cette COP sera de maintenir dans la boucle les pays du Sud. Leur confiance vis-à-vis du Nord s’érode. Les 100 milliards de dollars annuels que ceux-ci leur ont promis à la COP de Copenhague pour 2020, afin de les aider à faire face aux impacts du changement climatique, ne devraient arriver dans leur intégralité, et dans le meilleur des cas, qu’en 2023.

De quoi alimenter un sentiment d’exclusion que sont venues amplement nourrir les conditions d’organisation de cette COP26. Les mesures de sécurité sanitaire liées au Covid ont fait fondre les effectifs des délégations de nombreux pays du Sud, empêchant un certain nombre d’entre eux de participer aux négociations sur le même pied que les pays riches.

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Joël Cossardeaux

Les Echos
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A propos CARMEN FEVILIYE 808 Articles
Juriste d’affaires Ohada / Journaliste-Communicant/ Secrétaire Générale de l'Union de la Presse Francophone - UPF section France