Face à l’ampleur du secteur informel en Afrique, le législateur OHADA innove avec le statut de l’entreprenant, une mesure conçue pour faciliter la transition vers l’économie formelle. Une véritable opportunité pour les petits entrepreneurs.
Réponse juridique aux défis de l’informel, le statut de l’entreprenant, introduit par le droit OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires), s’adresse aux professionnels exerçant seuls une activité économique – commerciale, artisanale, agricole ou civile – hors du cadre structuré d’une entreprise formelle. L’objectif est clair : offrir un cadre légal et comptable allégé pour encourager les acteurs de l’économie informelle à se formaliser progressivement.
Dieudonné Mpouki Moussouki, greffier au tribunal de commerce de Paris, souligne que cette réforme traduit une volonté politique forte : « Il s’agit de moderniser l’économie africaine dans toutes ses composantes, en incluant le secteur informel, souvent délaissé. »
Pourquoi un tel statut ?
Le législateur OHADA répond à plusieurs enjeux fondamentaux :
- Modernisation du tissu économique
- Diversification des économies nationales
- Développement du secteur privé
- Réduction de l’insécurité juridique
- Meilleure visibilité économique pour les États
En donnant un cadre juridique souple mais structurant, l’OHADA permet aux entrepreneurs de tester leur activité en toute légalité, tout en facilitant leur accès au crédit bancaire et à la protection sociale.
Qui peut être entreprenant ?
L’entreprenant est une personne physique qui exerce une activité professionnelle à titre individuel, après une simple déclaration d’activité au tribunal.
Ce régime s’applique tant que le chiffre d’affaires ne dépasse pas un seuil fixé par chaque État membre. En cas de dépassement pendant deux années consécutives, l’entreprenant doit se conformer au régime classique de l’entrepreneur individuel.
Une démarche simple et gratuite
L’entreprenant n’est pas immatriculé au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier (RCCM), mais il y déclare son activité via un formulaire accompagné de quelques pièces justificatives (pièce d’identité, certificat de résidence, déclaration sur l’honneur, etc.).
Il reçoit ensuite un numéro de déclaration d’activité, qu’il doit mentionner sur tous ses documents professionnels, suivi de la mention :
« Entreprenant dispensé d’immatriculation ».
Des obligations comptables adaptées
Le régime comptable reste léger mais rigoureux. L’entreprenant doit :
- Tenir un livre chronologique des recettes et dépenses
- Conserver ce registre pendant au moins cinq ans
- Pour les activités de vente : enregistrer tous les achats avec justificatifs
Les États membres peuvent également proposer des incitations fiscales et sociales, adaptées aux réalités du terrain.
Un tremplin vers l’économie formelle
Ce statut permet aux petits entrepreneurs d’accéder à une reconnaissance légale, à des droits fondamentaux, et de bénéficier d’un accompagnement vers des structures plus élaborées (sociétés, coopératives, etc.).
Il constitue une porte d’entrée vers le développement économique inclusif et contribue à bâtir une économie plus transparente, plus stable et plus juste.
En instaurant le statut de l’entreprenant, l’OHADA répond à un besoin criant d’équité économique en Afrique. Cette initiative vise à formaliser les milliers de femmes, d’artisans, de commerçants et d’agriculteurs qui font battre le cœur économique du continent, souvent en marge du système.
L’ajout des procédures collectives complète cet arsenal en protégeant les plus vulnérables face aux aléas du marché. Une avancée juridique majeure, au service d’un développement plus inclusif.
Carmen Féviliyé
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