Ohada : implantation d’une société étrangère dans les pays membres

Le droit des affaires africain vise à favoriser l’essor des activités économiques des pays signataires et à promouvoir, notamment, les investissements étrangers en leur assurant une sécurité juridique. Dans les pays signataires, le paysage économique regorge d’entrepreneurs et de sociétés étrangères installés bien avant l’institution de l’Ohada. Aujourd’hui, portés par l’engouement général pour le continent africain, nombreux sont les investisseurs étrangers qui sont désireux de s’y implanter. Mais beaucoup ignorent les démarches à accomplir localement.

Actualisé le 01/07/2025 / 17h03

Notre chronique fait écho à la tenue de la 5ème édition de la Rencontre des entrepreners Francophones (REF2025) du 26 au 28 juin à Brazzaville et répond d’une manière générale à ces interrogations en présentant trois structures d’implantation acceptées en République du Congo et dans d’autres pays africains signataires de l’Ohada : le bureau de représentation, la succursale et la filiale.

Le bureau de représentation

Il constitue la structure d’implantation pour étudier le marché, analyser la faisabilité du projet et tester l’activité, tout en permettant une représentation de la société étrangère auprès de clients potentiels et des pouvoirs publics locaux. Simple bureau de liaison entre la clientèle et la société étrangère, le bureau de représentation n’a pas d’activité commerciale propre et ne doit en aucun cas engager du personnel salarié. N’étant soumise ni à l’immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) ni à la fiscalité locale, la structure ne dispose pas de personnalité juridique et fiscale propre.

Néanmoins, les documents commerciaux doivent contenir les coordonnées et mentions légales de la société étrangère. En tant qu’investissement étranger, la création d’un bureau de représentation dans l’espace Ohada doit être soumise à autorisation préalable des pouvoirs publics.

La succursale

Établissement secondaire de la société étrangère, la succursale permet la pénétration du marché. Le législateur Ohada la définit comme «un établissement commercial ou industriel, ou de prestations de services, appartenant à une société ou à une personne physique et doté d’une certaine autonomie de gestion ». Contrairement au bureau de représentation, la loi Ohada impose à la succursale l’immatriculation au RCCM, qui ne lui confère  pas pour autant la personnalité juridique.

Mais elle garde malgré cela une autonomie de gestion. La succursale est soumise à la fiscalité locale sans être obligée de tenir une comptabilité propre. En revanche, elle doit mentionner sur les documents commerciaux les informations permettant de l’identifier (coordonnées et mentions légales).

La durée d’activité de la succursale ne pouvait être supérieure à deux années à compter de son immatriculation au RCCM. Passé ce délai, le législateur exigeait qu’elle soit apportée à une société préexistante ou à créer, sauf dispense accordée par le ministre du Commerce de l’État de son implantation qui reconduit le délai de deux ans. De nombreuses sociétés étrangères dans les hydrocarbures et les travaux publics avaient obtenu cette dispense avant de procéder à l’apport de la succursale.

La filiale

Généralement, la filiale est définie comme une entreprise dont 50% du capital a été formé par des apports réalisés par une autre société dite « société mère », qui en assure la direction, l’administration et le contrôle par l’intermédiaire d’administrateurs ou de gérants qu’elle a désignés. Elle se différencie du bureau de représentation et de la succursale en ce qu’elle constitue une entité juridique distincte.

La loi Ohada définit de la même manière la filiale : «Une société est société mère d’une autre société quand elle possède dans la seconde plus de la moitié du capital. La seconde société est la filiale de la première». La filiale est une société juridiquement indépendante et soumise entièrement au droit Ohada et à la fiscalité locale. La société étrangère qui souhaite intégrer complètement l’espace Ohada peut constituer une filiale à faire immatriculer au RCCM sur présentation des documents sociaux.

Point actualisé sur l’implantation de sociétés étrangères dans l’espace Ohada

Depuis la réforme de 2014, les succursales étrangères doivent désormais se transformer en filiales d’ici 2 à 4 ans selon le pays. Cela renforce la sécurité juridique et la cohérence fiscale, même si des régimes d’exception subsistent en zone pétrolière (ex. Guinée équatoriale, Gabon).

Sur la transparence financière, l’Ohada incorpore maintenant l’obligation de tenir un registre des bénéficiaires effectifs, complété par des lois nationales (ex. Côte d’Ivoire – juin 2024), renforçant la lutte contre le blanchiment et rassurant les investisseurs..

En résumé, l’investissement en zone OHADA implique désormais de :

  1. Choisir la forme adaptée :
    • Bureau de représentation,
    • Succursale (transitoire),
    • Filiale (structure recommandée).
  2. Respecter les délais de filialisation.
  3. Se conformer aux obligations de contenu local.
  4. Mettre en place un registre transparent des bénéficiaires effectifs.

Pour un déploiement fiable, il est essentiel de s’appuyer sur un audit juridique préalable, un conseil local (avocat, CFAE) et un suivi réglementaire rigoureux.

Le CFAE désigne généralement le Centre de Formalités des Entreprises (parfois appelé Centre de Formalités Administratives des Entreprises dans certains pays). C’est un guichet unique mis en place dans les pays membres de l’OHADA pour faciliter :

  • la création d’entreprise (immatriculation, obtention du numéro fiscal, etc.)
  • la déclaration d’activité (notamment pour les entreprenants)
  • le dépôt des statuts, licences, autorisations diverses
  • le contact avec les administrations (impôts, sécurité sociale, registre du commerce…)

Les Objectifs des CFAE

  • Simplifier les démarches administratives pour les investisseurs locaux et étrangers
  • Réduire les délais de création d’entreprise
  • Centraliser les formalités liées à l’activité économique

Chaque pays membre de l’OHADA dispose de son propre CFAE national ou local, rattaché souvent au greffe du tribunal de commerce ou au ministère du commerce.

Vous êtes investisseur étranger et envisagez de vous implanter dans un pays membre de l’Ohada ? Pensez à contacter les Centres des formalités des entreprises ou un conseil local pour vous accompagner dans vos démarches.  Bienvenue dans la zone Ohada!

Carmen Féviliyé

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A propos CARMEN FEVILIYE 874 Articles
Juriste d’affaires Ohada / Journaliste-Communicant/ Secrétaire Générale de l'Union de la Presse Francophone - UPF section France