L’Union des patronats d’Afrique centrale : la voix du secteur privé de la sous-région

Créée le 13 décembre 1997 à Douala, l’Union des patronats d’Afrique centrale (Unipace) a tenu trois assemblées générales successives en 2019, marquant sa relance après une longue période de léthargie, au moment où des dossiers cruciaux sont à l’ordre du jour au niveau des institutions régionales.

L’ Union des patronats d’Afrique centrale est composée de syndicats patronaux de cinq pays membres de la Cemac : le Groupement interprofessionnel du Cameroun (Gicam), le Groupement interprofessionnel centrafricain (Gica), l’Union patronale et interprofessionnelle du Congo (Unicongo), la Confédération patronale du Gabon (CPG) et la Confédération nationale du patronat tchadien (CNPT). Depuis sa création, Unipace s’est impliquée dans d’importants dossiers intéressant au plus haut niveau le secteur privé de la zone Cemac : il s’agit de la négociation de l’Accord de partenariat économique (APE) entre l’Afrique centrale et l’Union européenne, de la libre circulation des ressortissants dans l’espace Cemac et de la nouvelle réglementation de change de la Cemac. Plus récent, le dossier de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLCAf) intéresse énormément l’Unipace, au regard des multiples mutations qu’elle doit impliquer au niveau des économies nationales, régionales et continentale et du secteur privé africain.

La négociation de l’APE entre l’Afrique centrale et l’Union européenne

Au lancement à Brazzaville en 2003 du processus des négociations de l’Accord de partenariat économique (APE) entre l’Union européenne et l’Afrique centrale dans la configuration Cemac, l’Unipace s’est imposée comme porte-parole de tout le secteur privé des pays membres de la Cemac, à l’exception de la Guinée Equatoriale qui était classée Pays moins avancé (PMA) et qui ne disposait pas à l’époque d’une organisation patronale. Ainsi, l’Unipace a participé à tous les travaux de négociations de l’APE à Bruxelles et dans les capitales de la sous-région. L’Unipace s’est impliquée dans ces négociations jusqu’à leur blocage qui a conduit en janvier 2009 à la signature en solo d’un accord d’étape ou intérimaire par le Cameroun avec l’Union européenne, accord ratifié par le Cameroun en juillet 2014 dans la perspective de la signature de l’APE régional qui n’a jamais eu lieu.

La libre circulation des ressortissants Cemac dans l’espace communautaire

Consciente de l’obstacle à l’intégration régionale constitué pendant longtemps par l’impo sition du visa pour la circulation des hommes dans l’espace communautaire, l’Unipace s’est mobilisée au cours des années 2000 pour la levée de cette contrainte, dans un premier temps à l’endroit des hommes d’affaires et chefs d’entreprises. Considérée comme la région la moins intégrée du monde, avec un commerce intra-régional qui atteint à peine 3% de son commerce extérieur, l’entrave à la mobilité intra-Cemac des personnes a été pendant longtemps un corollaire du faible niveau des échanges commerciaux internes. La récente suppression du visa d’entrée au Gabon et en Guinée Equatoriale aux ressortissants de la Cemac a finalement levé cette entrave à la libre circulation des hommes, entrave qui demeure malheureusement, avec la rareté ou l’absence, dans certains cas, des liaisons aériennes directes entre les villes des pays d’Afrique centrale.

La nouvelle réglementation de change de la Cemac

L’entrée en vigueur au milieu de l’année 2019 du nouveau règlement de change de la Cemac, publié en décembre 2018, et des instructions et lettres circulaires subséquentes, a ébranlé les entreprises dans un contexte marqué par la chute du cours du baril de pétrole et la rareté des devises étrangères. La perturbation des importations et des règlements financiers des prestations indispensables aux entreprises, résultant des blocages et des lourdeurs de l’application de la nouvelle réglementation, ont poussé l’Unipace à se mobiliser. Cette mobilisation a eu pour but de sensibiliser la BEAC, les autorités nationales et communautaires sur les graves conséquences économiques et financières de l’application brutale de certaines dispositions de la nouvelle réglementation de change. Les initiatives de l’Unipace à travers les rencontres avec la BEAC, les syndicats professionnels nationaux des secteurs (pétroliers et miniers, industriels…) particulièrement affectés par la nouvelle réglementation, ont permis d’obtenir des mesures d’assouplissement, notamment dans les délais d’application des dispositions de la nouvelle réglementation.

La Zone de libre-échange continentale africaine

L’Unipace tient à jouer pleinement son rôle de représentant du secteur privé d’Afrique centrale, dans le cadre de la mise en place de la Zone de libre-échange continentale africaine. Jusqu’à présent, les politiques de la zone Cemac ont oublié le secteur privé, sans lequel cette zone ne sera qu’une coquille vide pour cette région africaine qui peine à s’intégrer depuis des décennies, en dépit de l’utilisation d’une monnaie commune et de l’ambition de partage d’un marché commun. La Cemac veut se fondre dans un vaste ensemble économique continental dont elle risquera de subir les impacts négatifs, plutôt que d’en tirer les effets bénéfiques pour son secteur productif qui doit contribuer à cette zone de libre-échange, sous peine de disparaître en l’absence de compétitivité sur des marchés nationaux très étroits.

Plus de rencontres et de visibilité pour Unipace

En juillet 2019, l’Unipace a tenu à Douala une assemblée générale extraordinaire pour l’examen du brûlant dossier de la nouvelle réglementation de change Cemac. Ensuite, pour la première fois depuis sa création, elle a tenu une assemblée générale ordinaire à Brazzaville le 24 septembre 2019, au siège d’Unicongo, organisée sous la direction de Monsieur Célestin Tawamba, président du Groupement interprofessionnel du Cameroun et président en exercice de l’Unipace. Étaient présents M. Christian Barros et M. Alphonse Missengui, président et vice-président d’Unicongo, M. Alain Ba Oumar, président de la Confédération patronale Gabonaise (CPG), M. Ali Annadif, vice-président de la Confédération nationale du patronat tchadien (CNPT) et les secrétaires généraux des différentes organisations patronales.

Outre les quatre patronats présents, le Groupement interprofessionnel centrafricain (GICA) a été représenté par le Gicam. Cette assemblée générale de Brazzaville a été rehaussée par la présence des responsables de l’Organisation et du Bureau international du travail (OIT et BIT) en Afrique centrale représentés au plus haut niveau par Mme Aminata Maïga, M. François Murangira et M. Lassina Traoré, respectivement directrice du BIT à Kinshasa, directeur du BIT à Yaoundé et spécialiste technique principal pour les activités des employeurs au bureau du BIT à Yaoundé. Au cours de cette assemblée générale, un tour d’horizon a été fait des conjonctures économiques nationales et sous-régionale et des dossiers préoccupants du secteur privé, notamment les difficultés d’accès aux devises, la place de l’Afrique centrale dans la Zone de libre échange continentale (ZLEC) et la gouvernance de l’Unipace.

Les membres de l’Unipace ont unanimement reconnu le rôle essentiel de leur union comme plateforme du secteur privé de l’Afrique centrale et interlocuteur de la Cemac, de la CEEAC et des organismes internationaux partenaires (BAD, Banque mondiale, Union européenne, PNUD…) pour tous les dossiers d’intérêt communautaire touchant ou impliquant le secteur privé. Pour cela, une résolution a été prise d’élargir l’Unipace aux organisations patronales de la RDC et d’Angola, qui sont deux économies importantes de l’Afrique centrale, sans oublier la Guinée Equatoriale. Pour cela, le BIT a promis de soutenir l’Unipace dans la mise en œuvre de cette résolution.

L’Unipace s’est également dotée au cours de cette assemblée générale d’un plan d’action pour la période 2019-2022 qui vise essentiellement le renforcement de la position de l’Unipace en tant que représentant du secteur privé communautaire et interlocuteur de la Commission de la Cemac et des institutions à caractère économique, financier et social, la veille sur les performances économiques de la zone, le commerce intra-communautaire et les processus d’intégration régionale. Trois mois après Brazzaville, l’Unipace a tenu une assemblée générale extraordinaire à Libreville le 13 décembre 2019, en marge de la célébration des 60 ans de la Confédéra tion patronale gabonaise (CPG). Elle a ainsi marqué sa ferme volonté de se mobiliser en permanence sur tous les dossiers d’intérêt commun – notamment le climat des affaires qui place tous les pays membres de la Cemac entre le 167e et le 184e rang du Doing Business sur 190 pays dans le monde –, la grande vulnérabilité des économies nationales et régionales due à leur très forte dépendance vis-à-vis de quelques matières premières, notamment du pétrole. Cette assemblée générale de Libreville a réaffirmé la volonté de l’Unipace de pérenniser le principe de la rotation des assemblées générales dans les différents pays des organisations membres.

 Jean -Jacques Samba / Unicongo

 

 

 

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A propos CARMEN FEVILIYE 890 Articles
Juriste d’affaires Ohada / Journaliste-Communicant/ Secrétaire Générale de l'Union de la Presse Francophone - UPF section France